JUSTICE
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6
juin 1999
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La cour d'assises du Haut-Rhin va juger lundi une mère
qui, en 1996, a tué sa fille de 4 ans, dont elle ne supportait plus la
maladie.
SI
LE MOT «
drame » a un sens, l'affaire qui sera jugée à partir de demain devant
la cour d'assises du Haut-Rhin à Colmar pourrait en être la définition. Sylviane
Streissel, 34 ans, est accusée de meurtre sur mineure de 15 ans
particulièrement vulnérable, en l'occurrence sa fille de 4 ans,
atteinte d'une maladie génétique incurable. Le
matin du 6 juin 1996, un automobiliste qui circule sur le CD 52 en
direction d'Ottmarsheim prend Sylviane Streissel en stop, rappelle
l'acte d'accusation. Elle porte un pantalon blanc mouillé et maculé de
taches d'herbe et de terre. Hurlant et pleurant, elle demande au
conducteur de l'amener à la gendarmerie et dit : « La voiture est
à l'eau, j'ai tué ma petite fille, je veux me tuer, donnez-moi un
pistolet ». Le corps de la petite Evelyne est en effet retrouvé à
Niffer dans le grand canal d'Alsace, deux kilomètres en aval de la
voiture dont sa mère est sortie in extremis. DÉPRESSION
Toujours
selon l'acte d'accusation, Sylviane Streissel avait sombré dans la dépression
depuis le diagnostic de la maladie de sa fille. Elle avait déjà évoqué
l'idée de la tuer et avait elle-même tenté de se suicider en
septembre 1995. Elle a effectué une nouvelle tentative en détention,
un an plus tard. Pourtant,
l'accusée « avait livré un combat incessant et désespéré contre
la maladie de sa fille (...) et avait toujours été en quête
des meilleurs soins possibles ». Deux séjours en établissement
psychiatrique n'ont pu empêcher le procès devant les assises, un cas
sur lequel les neufs jurés et la cour vont se pencher jusqu'à
vendredi. |
8
juin 1999
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Le
procès prévu cette semaine à la cour d'assises du Haut-Rhin à Colmar
n'aura pas lieu. Sylviane Streissel, 34 ans, devait comparaître pour
avoir tué en 1996 sa fillette de 4 ans, atteinte d'une maladie génétique
incurable (notre édition de dimanche). D'abord détenue à Strasbourg,
elle avait rejoint un établissement psychiatrique sur décision préfectorale,
à la suite d'une tentative de suicide. Or, ce placement d'office n'a
pas été levé par l'autorité administrative, qui a estimé que
l'accusée ne se trouve pas dans un état psychique permettant de la
juger. Le président de la cour d'assises Dominique Brodard n'a pu que
renvoyer le procès à une session ultérieure, dont la date reste à déterminer. |
14
décembre 1999
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Sylviane Streissel comparaît devant les assises du
Haut-Rhin, pour avoir noyé sa fille, qui souffrait d'une maladie
incurable, en juin 1996, dans le grand canal d'Alsace. Evelyne
est morte à 4 ans et demi, noyée dans le grand canal d'Alsace, à
Niffer, où sa mère l'a plongée avec sa voiture, le 6 juin 1996. C'est
du moins de ce meurtre que doit répondre depuis hier Sylviane Streissel,
35 ans, devant la cour d'assises du Haut-Rhin à Colmar. Elle
avait sombré dans une dépression sans fond lorsqu'une maladie génétique
incurable, qui atteint le cerveau, s'était déclarée chez sa fille. La
première journée d'audience, hier, a tenté de cerner la personnalité
de l'accusée. En tailleur gris et les cheveux qui virent à
l'identique, marquée, vieillie, elle raconte ses souvenirs et aussi ses
absences. Elle dit ne plus rien se rappeler de son enfance avant 8 ans.
L'effet d'une noyade évitée de justesse à cet âge ? Travailleuse
endurcie, elle se consacre ensuite corps et âme à ses études. Plus
tard, infirmière de profession, elle voit, dans un service de chirurgie
cancéreuse strasbourgeois, des patients en phase terminale, dont le
traitement médical abrège les souffrances intolérables. « PERDRE LES PÉDALES »
Elle
épouse Serge Streissel en 1989. Un mariage poussé par les parents de
ce dernier, chez qui loge le couple, car Sylviane est enceinte de leur
première fille. Ils déménagent à Saint-Louis. Mais l'accusée ne
supporte pas d'être éloignée de ses parents et de ses sœurs. En
1991, naît Evelyne. Et
dès l'été 1994 apparaissent des signes de maladie. Les
examens se succèdent. Sylviane perd son emploi. « Je n'avais plus
la pensée. Il n'y avait qu'Evelyne qui comptait », raconte-t-elle
en sanglotant, perdant parfois le fil des questions de la cour
colmarienne. Evelyne ne peut bientôt plus marcher, ne parle plus. Le
diagnostic est confirmé début 1995 : encéphalopathie mitochondriale.
Sa mère confie qu'elle conçoit alors « une idée de mort, de délivrance
». Les
expressions « péter les plombs » et « perdre les pédales
» reviennent plusieurs fois dans sa bouche : « Je n'étais pas
consciente que j'étais dépressive ». Ses séjours en établissement
psychiatrique et maison de santé n'y font rien. Elle culpabilise. Quand
l'état de son enfant s'améliore, elle ne se rend plus compte de rien.
Sa dépression s'aggrave. « J'en voulais au corps médical », affirme-t-elle d'une voix trébuchante. Un
contraste singulier avec son mari qui, les deux mains posées sur la
barre, se montre méthodique dans ses réponses. Et qui avoue avoir sans
doute été « un peu absent ». Car
même avant la maladie d'Evelyne, et encore plus après, sa femme lui
reproche de la laisser seule, de se réfugier dans son travail
d'expert-comptable. Pourtant, l'accusée a connu plusieurs aventures
sentimentales, avant et après son mariage. « J'avais besoin d'être
écoutée, de tendresse », explique-t-elle. « J'avais
l'impression que je n'existais pas ». Devant des proches, elle
parle même quelquefois de supprimer Evelyne. Ce qui n'empêche pas le
couple d'acheter une maison à Village-Neuf. « APPEL AU SECOURS »
Le
comportement de l'accusée, qui a, à plusieurs reprises, attenté à
ses jours, constituait-il, comme elle l'affirme, « des appels au
secours » ? C'est ce que devra notamment déterminer ce procès. Sylviane
Streissel, qui risque la réclusion criminelle à perpétuité, y
comparaît libre. Ses avocats ayant obtenu dès hier matin son élargissement
sous contrôle judiciaire. Les audiences doivent se poursuivre jusqu'à
vendredi soir. |
15
décembre 1999
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Sylviane Streissel n'a pas pu dire à la cour
d'assises du Haut-Rhin comment elle a noyé sa fille. Mais elle se
souvient pourquoi elle voulait se suicider avec elle.
« ON
EST PARTI. Je planais vraiment. Je roulais, je roulais... J'ai voulu
partir avec elle... Partir et mettre fin à nos souffrances... » C'est tout ce dont se souvient Sylviane Streissel, 35 ans, de la journée
6 juin 1996. Elle est pourtant accusée d'avoir noyé sa fille Evelyne,
4 ans et demi, ce jour-là, en la jetant à bord de sa voiture dans le
grand canal d'Alsace, à Niffer (notre édition d'hier). Devant
la cour d'assises du Haut-Rhin, à Colmar, où elle comparaît depuis
lundi, son leitmotiv est l'idée d'une « délivrance » par la
mort. Pour elle, mais aussi pour sa fille, qui était atteinte d'une
maladie génétique incurable. Quand Sylviane Streissel se lève pour
parler, sa main gauche s'agrippe à son poignet droit. Hâve, mortifiée,
elle répète des « Je ne sais pas » entrecoupés de silences
aussi éprouvants que ses paroles et ses larmes. Le
matin du drame, elle téléphone à Serge, son époux. La discussion
tourne au vinaigre. Elle donne ensuite un bain à Evelyne. On retrouvera
dans sa maison de Village-Neuf deux sèche-cheveux, dont l'un empli
d'eau. Ce qui fait dire à certains témoins qu'elle a d'abord tenté de
tuer l'enfant en jetant un des appareils dans la baignoire. Le compteur
électrique a d'ailleurs disjoncté. Le médecin légiste qui a examiné
la dépouille d'Evelyne confirme cependant qu'elle est bien décédée
par noyade dans le grand canal et non dans la baignoire. Il n'a pas
trouvé trace de brûlures sur la peau. « TROUS NOIRS »
Alors
que s'est-il exactement passé à Niffer, après 15 km de route ? La présidente
de la cour rappelle une déposition de juillet 1996, dans laquelle
l'accusée déclarait : « Je suis entrée dans l'eau, j'étais bien.
La petite souriait. La voiture a patiné dans la vase. J'ai réussi à
ouvrir la portière. La voiture est partie en quelques secondes. »
Le corps d'Evelyne est repêché 2 km en aval. Sa mère avance qu'un «
flash » l'a fait sortir du véhicule au dernier moment : elle
devait aller chercher son autre fille à l'école. Une
amie de Sylviane Streissel, elle-même mère de deux enfants handicapés,
avait donné dans la matinée un témoignage d'une dignité presque
effrayante. « Il y a des structures pour les enfants handicapés,
par pour les parents », constate-t-elle. « Une mère n'accepte
jamais que ses enfants soient comme cela. Je pourrais être à la place
de Mme Streissel. Parfois, j'ai des trous noirs. On trouve
des dérivatifs pour ne pas aller à l'extrême ». Me Moser, avocat
de l'accusée, interroge : « Est-ce qu'on peut être amené à des
gestes dont on n'a pas pleinement conscience?» Réponse : «
Oui, car à un moment donné, vous ne savez pas où vous en êtes, dans
le désarroi le plus total. J'ai été amenée à me poser la question :
ou ce sont les enfants qui partent ou c'est moi qui pars. » PRÉMÉDITÉ ?
Ce
désarroi, les sœurs de Sylviane Streissel l'ont confirmé. Selon les
termes de l'aînée, Mais
pourquoi n'avait-elle confié son envie de se suicider et de tuer
Evelyne qu'à des amis, jamais aux membres de sa famille ? A-t-elle prémédité
son acte ? Pourquoi, sinon, avoir vidé son compte bancaire ? Son mari,
partie civile en son nom propre et en celui de la première fille du
couple, ainsi qu'une sœur de l'accusée, posent cette autre question.
Comment des médecins du centre psychiatrique de Rouffach, où Sylviane Streissel venait de faire un nouveau séjour, ont-ils pu la juger guérie
et la libérer moins d'une semaine avant le drame ? La cour a jusqu'à
vendredi pour comprendre.
16 décembre 1999 Le meurtre de la petite Evelyne est
l'aboutissement d'une descente aux enfers de sa mère, ont expliqué
plusieurs témoins devant les assises du Haut-Rhin.
LE
PARADOXE
est tel qu'il témoigne à lui seul de l'état de dépression où
se trouvait Sylviane Streissel, lorsqu'elle a noyé sa fille le 6
juin 1996 à Niffer (nos éditions d'hier et d'avant-hier).
Evelyne, 4 ans et demi, qui était atteinte d'une maladie génétique
incurable, a plongé avec la voiture projetée dans le grand canal
d'Alsace. Un meurtre ? « Un acte d'amour », ont affirmé
hier après-midi deux témoins à la cour d'assises du Haut-Rhin,
à Colmar, devant laquelle la mère comparaît depuis lundi. Il y a d'abord cette psychologue, qui a suivi la famille. « Je
n'ai jamais vu un désespoir tel chez une maman »,
souligne-t-elle. L'aide que recevait l'accusée, surtout matérielle,
n'était pas la bonne. « A force de trop aider, on disqualifie
la personne en souffrance. Quelque part, il n'y avait pas d'amour.
On est entré dans le clivage ''bonne mère/mauvaise mère''. Pour
moi, c'est ce qui l'a renvoyée dans le désespoir le plus
complet. » Alors oui, le meurtre dont est accusée Sylviane
Streissel constitue « un acte ultime d'amour. Dans le sens où
elle savait où allaient en arriver les choses avec cette maladie
dégénérative. » C'est-à-dire à la mort de l'enfant. SECONDE MÈRE
« Elle était au fond du trou. Elle cherchait à tout prix une
raison à cette maladie »,
confirme une amie que Sylviane Streissel avait connue au collège
et qui est devenue médecin. « Elle ne voyait plus qu'une
seule solution pour soulager tout le monde : supprimer sa fille et
elle. C'était vraiment un acte d'amour. Elle ne le supportait
plus », conclut-elle des conversations téléphoniques que
les deux femmes ont partagées entre janvier et mai 1996. La détresse
des parents d'enfants lourdement handicapés est telle que ce
drame « aurait pu arriver dans n'importe quelle autre
famille », estime le responsable de l'Institut médico-pédagogique
Sainte-Claire de Mulhouse, que fréquentait Evelyne. Le ton avait été tout autre, dans la matinée, avec Véronique, la
« nounou » d'Evelyne. Elle était presque devenue la seconde mère
des enfants Streissel, les prenant en charge bénévolement
lorsque la mère était trop faible ou lors de ses séjours en établissement
psychiatrique. Pour la première fois depuis le début du procès,
cette femme de cœur arrive à faire sourire la cour, par sa
franchise et sa tendresse. Mais elle décrit aussi une accusée au
bout du rouleau UN JOUR OU L'AUTRE
Selon la gardienne, Sylviane Streissel, parfois, ne supportait plus
ses enfants malgré son amour. Elle n'arrivait plus à s'en
occuper, alors même qu'elle avait l'impression de leur consacrer
tout son temps, au point de délaisser sa première fille. Les
soupirs et les larmes reprennent le dessus. « Ce qu'elle a
fait, elle l'aurait fait un jour ou l'autre », assure la
nounou. « Le jour où c'est arrivé, Evelyne aurait dû être
à l'école. C'est pour cela que je dis que c'était prémédité.
» Serge Streissel, le père, s'effondre. Véronique a même saisi des propos tenus à sa propre fille par la
grande sœur d'Evelyne : « Elle savait comment tuer sa sœur. Elle a dit : ''Si tu jettes un sèche-cheveux dans le bain, hé
bien ma petite sœur elle est morte'' ». Le jour du meurtre,
on a retrouvé deux sèche-cheveux au domicile de Village-Neuf des
Streissel, dont un rempli d'eau, à côté de la baignoire pleine.
Un autre jour, la gardienne vient chez les Streissel, en l'absence
du père. La mère ouvre la porte :« Elle avait une ceinture
dans la main. Elle me dit : ''Je cherche quelque chose de
solide''. Je lui dis : ''Pourquoi ? '' - ''Pour pendre ma fille''
». Dans le box des accusés, où elle semble sombrer,
Sylviane Streissel murmure des « quoi! » et des «
c'est pas possible », noyés dans les sanglots.
17
décembre 1999
Sylviane Streissel a exprimé ses regrets devant les
assises du Haut-Rhin. Les experts, eux, se demandent si elle était lucide
quand elle a tué sa fille.
Fin
de l'audience. Sylviane Streissel se lève. « Je voulais demander
pardon à Serge. » Pour la première fois, elle porte un jugement sur
le meurtre de leur fille Evelyne, atteinte d'une maladie génétique
incurable, qu'elle a noyée le 6 juin 1996, à Niffer, dans le grand canal
d'Alsace. Un geste désespéré dont elle répond depuis lundi devant la
cour d'assises du Haut-Rhin, à Colmar (nos éditions de mardi à hier). « Je regrette tout ce qui est arrivé. Mais je crois qu'Evelyne ne
souffre plus. J'aurais aimé avoir la force de l'accompagner jusqu'au bout
», avait-elle
déjà confié le matin, laissant planer un infini silence. « Je
regrette tout. De ne pas être restée. J'ai craqué, tout s'est effondré.
Une mère est tellement aveuglée, tellement prise par un enfant qui est
malade. » En face, son mari s'était affalé, le poing contre la
bouche, secouant la tête. Le
débat, lui, se trouvait ailleurs. Sylviane Streissel ne souffre pas de «
pathologie mentale lourde », s'accordent à dire les experts. Tout le
problème est de savoir si elle agissait totalement en conscience, ou
seulement en partie(*).
Là, les experts ne s'entendent plus. DANS UNE BULLE
Le
psychologue Milic Sokic décrit « un état crépusculaire »,
comparable à celui d'une personne somnambule ou sous hypnose. Pour
simplifier, c'est l'inconscient qui prend les commandes parce que le
conscient ne s'en sort plus. « Cette bulle dans laquelle elle
se trouve ne se déchire qu'au moment où elle se met à hurler sur la
berge », après le meurtre, affirme-t-il. L'accusée
trouve un défenseur efficace avec le docteur Roland Coutanceau. Ce
psychiatre hospitalier fait sensation avec un exposé aussi technique
qu'argumenté. Pour lui, la dépression de Sylviane Streissel «
atteint le niveau mélancoliforme », un état plus sévère encore
que la dépression de caractère névrotique. Il estime que son
discernement était aboli lors du drame. En témoigne, selon lui, le fait
qu'elle a voulu tuer son enfant mais s'est comme réveillée pour ne pas
mourir elle aussi. « ZONE FRONTIÈRE »
« Elle était parfaitement lucide », assure en revanche Michel Patris, professeur de
psychiatrie à Strasbourg. Il considère simplement que « son
discernement a été altéré », dès que la maladie de sa fille
s'est déclarée. Même son de cloche chez le docteur Jean-Claude Pomes, médecin-chef au centre hospitalier de Mulhouse. Il réfute l'hypothèse de l'épisode
crépusculaire. Il argue que la mère, quand il l'a rencontrée, pouvait
raconter les faits en détail. « L'accusée reste accessible à la sanction pénale »,
juge également le psychiatre Prosper Ruimy. Pour lui, l'état psychique
de Sylviane Streissel « a entravé le contrôle de ses actes sans
vraiment l'abolir ». Il ajoute ce bémol : entre altération et
abolition, « on est sur une zone frontière ». La cour décidera-t-elle
de la franchir, même si aucun élément n'est venu appuyer l'éventualité
d'un « trou noir » passager, provoqué chez l'accusée par une surdose médicamenteuse
? La réponse devrait tomber ce soir, après le réquisitoire du ministère
public et les plaidoiries des avocats de la partie civile et de l'accusée.
(*) L'article 122.1 du code pénal précise : « N'est pas pénalement responsable la personne qui était atteinte, au moment des faits, d'un trouble psychique ou neurologique ayant aboli son discernement ou le contrôle de ses actes. » Si ce trouble a simplement « altéré » le contrôle des actes, la personne « demeure punissable » mais cet élément est pris en compte pour déterminer la peine.
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18
décembre 1999
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La cour d'assises du Haut-Rhin a condamné Sylviane
Streissel à cinq ans de prison dont deux ferme. Un verdict clément malgré
les circonstances aggravantes. Sylviane
streissel ne retournera pas en détention. La cour d'assises du Haut-Rhin,
à Colmar, l'a pourtant condamnée hier soir à cinq ans de prison dont
deux ferme, assortis de cinq ans de privation des droits civiques, civils
et familiaux. Elle répondait du meurtre de sa fille Evelyne, quatre ans
et demi, qu'elle avait noyée le 6 juin 1966 dans le grand canal d'Alsace,
à Niffer. La
peine d'enfermement est couverte par les trois années de détention préventive
qu'elle a effectuées. Sylviane Streissel, par la voix de ses défenseurs,
a exprimé son soulagement et a affirmé qu'elle souhaitait renouer le
dialogue avec Serge, son mari. Lors
de l'ultime journée du procès, chacun a reconnu l'état de profonde dépression
où se trouvait l'accusée lors des faits. Mais pour l'avocat général
Patrick Beau, Sylviane Streissel « savait ce qu'elle faisait ».
Il a rappelé ces éléments : elle a semble-t-il tenté d'électrocuter
l'enfant dans sa baignoire juste avant de partir à Niffer ; elle a pris
le temps d'attraper son sac à main dans la voiture projetée dans le
canal avec la fillette à son bord ; les fenêtres du véhicule étaient
ouvertes et la première vitesse enclenchée. ACTION ANTICIPÉE
L'avocat
général en a conclu que « ce meurtre a été commis délibérément,
consciemment », sur une victime qui était « le comble de
l'innocence ». Il a requis cinq ans de prison, dont trois ferme et
cinq ans de privation des droits civils, civiques et familiaux. Me
Philippe Noël, avocat de la partie civile, a lui expliqué au nom de
Serge Streissel : « Il veut surtout que justice soit rendue à Evelyne.
» La mère avait parlé à plusieurs reprises de supprimer sa fille
avant de passer à l'acte, a-t-il remarqué. « Madame Streissel avait
anticipé son action », selon Me Noël, qui a exhibé à la fin de sa
plaidoirie une photo de la victime. Sylviane et Serge Streissel, qui n'ont
pas échangé un regard durant toute la semaine du procès, sanglotaient
sur leurs bancs, face à face. Pour
la défense, Me Thierry Moser, a mis l'accent sur le témoignage du
responsable de l'institut pour enfants handicapés que fréquentait
Evelyne : ce drame aurait pu arriver dans n'importe quelle famille
confrontée à pareille maladie. Une assertion confirmée par le témoignage
d'une mère de deux enfants handicapés. « Je pourrais être à la
place de madame Streissel », avait-elle estimé. |
Fabien MARÉCHAL |