Vous avez aimé La Conjuration des imbéciles de John Kennedy Toole? Le Seigneur des porcheries développe une approche assez similaire mais bien plus haletante, deux fois plus drôle, ravageuse dans son propos, le tout avec une vivacité de style et une liberté de ton peu commune. Les deux ouvrages ont par ailleurs le point commun d'être des premiers romans. Et que leur auteur s'est suicidé : Tristan Egolf a mis fin à ses jours fin mai 2005.
Ce Seigneur des porcheries est un enfant "anormal", dotée d'une volonté extra-terrestre, perdu entre l'image d'un père mort, une mère recluse et une société dont il n'a rien à secouer. Mais justement, un homme moitié-reclus, moitié-génie agricole, ça fait peur. Le personnage principal (difficile d'écrire "héros"), poursuivi par une malchance incommensurable, va provoquer, d'abord involontairement puis tout à fait volontairement, un enchaînement de catastrophes faisant passer l'Apocalypse pour un petit tour en train fantôme.
Ces 600 pages se dévorent sans pouvoir décrocher un instant. Pris au coeur, à la gorge et à la rate (celle qui se dilate), on reste abasourdi devant tant d'imagination, sans jamais tomber dans l'absurde. Car sur le fond, ce livre est tout aussi riche. Analyse foudroyante de l'exclusion sociale, du désir de revanche, de la psychologie des foules -qui peuvent être aussi porteuses de force positive dans l'union que d'horreur- ou encore des influences combinées de l'alcool et de la religion dans le Mid-West américain, Le Seigneur des porcheries est un réquisitoire jubilatoire, profondément personnel et original. Et puis, c'est assez rare pour le signaler, on y rit vraiment de bon coeur, pas d'un "ha ha ha" intériorisé, non, non, toutes dents dehors. Ce premier livre de Tristan Egolf est, tout simplement, indispensable.
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